Nous lisons tous sur les lèvres : comment et pourquoi ?
news L’audition constitue évidemment un élément clé de la communication orale. Néanmoins, nous ne nous limitons pas à cela : la compréhension passe aussi par d’autres mécanismes, dont la lecture labiale, et ceci même en l’absence de problèmes auditifs.
Ainsi que l’explique cette équipe canadienne (université Laval), nous ne faisons pas d’effort conscient pour lire sur les lèvres des personnes qui nous parlent, mais notre cerveau utilise ces signaux pour comprendre ce qu’elles nous disent, et ceci est particulièrement important lorsqu’on nous parle à voix basse ou dans un environnement bruyant. Question : ce paramètre joue-t-il un rôle plus ou moins significatif dans les difficultés de compréhension, un phénomène qui s’accentue avec l’âge qui avance ?
Utiliser l'information visuelle
De fait, si l’audition a tendance à décliner, ceci suffit-il à expliquer les problèmes rencontrés par une frange significative des seniors et des personnes âgées ? Point clé : pour bien comprendre, il faut entendre bien sûr, mais il faut aussi être en mesure d’utiliser l’information visuelle, de l’intégrer à l’information auditive, puis de décoder et de traiter ces signaux.
Afin d’établir l’importance de ce schéma, les chercheurs québécois ont réalisé une série de tests auprès de deux groupes : le premier formé de participants âgés de 20 à 42 ans, et de 60 à 73 ans dans le second. Ils ont été placés devant un ordinateur. Des enregistrements de trois syllabes - pa, ta ou ka - ont été diffusés dans trois configurations : audio uniquement, visuel uniquement (le visage de la personne prononçant la syllabe, sans le son), et audio et visuel à la fois. Mission : identifier la bonne syllabe.
Le port du masque complique les choses
Première constatation : la capacité à utiliser les signaux visuels pour comprendre le langage est présente dans les deux groupes, mais son efficacité est réduite parmi les plus âgés. Lors d'une seconde expérience, les chercheurs ont projeté des courtes vidéos montrant le visage d’une personne prononçant les mêmes trois syllabes. Cette fois, les participants ont eu droit à des indices visuels susceptibles de les aider à trouver la réponse correcte.
Résultat : ces indices facilitent de façon similaire la perception de la parole dans les deux groupes, ce qui revient à dire que ce sont les processus d’intégration des signaux visuels et auditifs, et pas seulement les processus auditifs comme tels, qui semblent le plus affectés par le vieillissement.
La coordinatrice de ces travaux poursuit : « Le mouvement des lèvres n’est qu’un des signaux visuels que nous utilisons pour comprendre les autres. Les expressions du visage et les mouvements des mains fournissent aussi des informations visuelles qui aident à la communication et à la compréhension du langage. Nos résultats dégagent des pistes intéressantes pour la mise au point d’interventions visant à améliorer la capacité à percevoir la parole, en particulier parmi les personnes âgées ».
Sur ce plan, la crise Covid soulève d’ailleurs un problème méconnu, puisque le port du masque n’a pas simplifié la vie des personnes qui ont du mal à comprendre les autres, en les privant de l’information visuelle provenant de la lecture labiale.
Voir aussi l'article : Seniors : perte auditive, isolement et dépression