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Problème d’alcool : diminuer ou arrêter ?
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En cas de dépendance, l’arrêt de l’alcool est considéré par beaucoup comme la seule option vraiment crédible. Toutefois, le débat évolue et la réduction de la consommation – qui devient alors contrôlée - apparaît de plus en plus comme une alternative possible à l’abstinence.
Jusqu’à ces dernières années, l’option thérapeutique pour les patients alcoolodépendants était l’abstinence totale et durable, partant du constat qu'autrement, la rechute est inévitable. Ainsi que l’explique le Pr Olivier Cottencin (service d’addictologie du CHRU de Lille), « on sait pourtant, depuis les années 70, que certains patients dépendants à l’alcool peuvent par la suite en consommer normalement ou comme des usagers à risque, sans retomber dans l’alcoolodépendance ».
Cité par Le Quotidien du Médecin, le spécialiste ajoute que pour les tenants de l’abstinence, l’explication de cette consommation (relativement) maîtrisée tient au fait que ces patients n’étaient vraisemblablement pas alcoolodépendants au sens strict du terme.
Les effets positifs pour la santé
A partir de là, un objectif de réduction des quantités paraît intéressant pour certaines personnes (il ne s'agit donc pas d'une généralité !), en particulier en ambulatoire. « En milieu institutionnel, où sont pris en charge les patients présentant les formes de dépendance les plus sévères, nous prônons toujours une abstinence totale », indique le Dr Marion Immediato, médecin addictologue au Centre médical Les Bruyères (situé à Létra en Rhône-Alpes). « En revanche, chez des patients présentant un usage nocif d’alcool, la réduction de la consommation peut être un objectif pouvant amener des bénéfices importants ».
Le Pr Cottencin indique en substance que l’intention ne consiste pas à attaquer ce dogme de l’abstinence, mais l’orientation s’appuie sur des recherches de large envergure qui montrent que si les personnes abstinentes parviennent plus facilement à ne pas développer à nouveau une dépendance, la majorité des sujets ayant de faibles niveaux de consommation d’alcool ne rechutent pas non plus. En d’autres termes, ils ont des consommations contrôlées sans pour autant redévelopper une dépendance.
Le choix du patient
Selon le Dr Immediato, « abstinence ou réduction, le choix appartient au patient ». Ainsi, « le fait de ne pas prôner à tout prix une abstinence peut lui permettre de devenir maître de ses choix et renforce son sentiment d’autonomie et d’efficacité personnelle ». L’exigence d’un arrêt total peut paraître trop difficilement accessible à ceux qui ne sont pas prêts à stopper la consommation, du moins dans un premier temps. La réduction est aussi une manière pour eux, et en fait pour un plus large panel de patients, d’entrer dans le soin, et pourquoi pas de marquer ainsi une étape vers l’abstinence.
Mais qu’en est-il du risque évident de perte de contrôle, de rechute ? En fait, cela peut aider le patient à prendre conscience de ses difficultés et l’amener au constat que, finalement, seule l’abstinence est pour lui la bonne – la seule - solution. Le Dr Immediato poursuit : « Le passage d’une réduction de consommation à une abstinence prend généralement plusieurs années. Ce sont souvent les pertes familiales et professionnelles subies par les patients qui leur font réaliser l'échec des tentatives de contrôle. Sachant que ce constat fait par le patient lui-même améliore la plupart du temps son adhésion à la prise en charge ». Le Pr Cottencin ajoute que « chaque patient doit faire sa propre expérience pour optimiser ses chances de réussite ».
« Il faut que l’abstinence soit heureuse »
Pour corroborer ce parallèle entre tabac et alcool, le Pr Cottencin rapporte que « un certain nombre de patients alcoolodépendants sont capables d’avoir une consommation occasionnelle tout en étant conscients qu’ils risquent de rechuter s’ils boivent davantage. Parmi les patients présentant tous les critères d’alcoolodépendance, ceux qui s'exposent à un risque moindre de rechute sont les plus jeunes, n’ayant pas d’histoire familiale d'alcoolisme, pas de perturbations des fonctions exécutives, ni de troubles psychiatriques ou d’autres addictions ».
L'abstinence doit rester l'objectif prioritaire
Le Dr Marion Immediato estime que « la qualité de vie du patient fait désormais également partie des objectifs thérapeutiques. Si le choix de l’abstinence est fait, il faut que l’abstinence soit heureuse. Certains patients sont incapables, surtout en début de traitement, d’envisager une vie heureuse sans alcool. Cela suppose en effet qu’ils aient fait le deuil du produit, qu’ils aient accepté de participer différemment à certains moments festifs et de mettre certaines relations à distance… Si les patients ne sont pas prêts, les pousser vers l’abstinence c’est prendre le risque de les placer en situation d’échec, de renforcer leur pathologie dépressive et d’être donc contre-productif ».
L’abstinence doit néanmoins rester un objectif prioritaire. « En pratique », ajoute le Pr Cottencin, « lors de la première prise en charge, l’abstinence est conseillée par prudence, afin de rompre avec le comportement antérieur et les habitudes. Puis, lors de la phase ambulatoire ou de suivi, la moindre consommation d’alcool doit être surveillée avec des traitements permettant de lutter contre le craving. Si par la suite, le patient constate que la consommation d’alcool devient source de rechute, l’orientation se fera alors vers l’abstinence complète ».
Le Dr Martin André conclut : « Il s’avère donc nécessaire, à un moment ou à un autre, que le patient vive cette expérience de façon à pouvoir l’intégrer émotionnellement et rationnellement, car il paraît difficile pour quiconque d’admettre en première instance la nécessité de devenir abstinent toute sa vie ».
Un test en ligne permet à chacun d'évaluer si sa consommation d'alcool peut être considérée comme problématique : cliquez ici pour accéder au questionnaire.