Prévenir ou retarder la démence (Alzheimer) : « adapter son style de vie est le meilleur médicament »

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L'Agence européenne des médicaments (EMA) a rendu un avis défavorable à la commercialisation du médicament lecanemab sur le marché européen. Un coup dur pour les personnes qui pensaient enfin trouver un remède contre la démence. Retour à la case départ ? « Pas du tout », affirme le prof. em. Reginald Deschepper, anthropologue médical. « Pour les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, il y a de l’espoir : l’approche multidisciplinaire. » 

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Médicament contre la démence : le Lecanemab refusé

Pr ém. Reginald Deschepper explique : « Le Lecanemab offrait une lueur d'espoir pour les malades de démence, car il ralentissait le déclin cognitif de 27 % chez un groupe spécifique de patients en éliminant une protéine nocive (l'amyloïde). Malheureusement, le médicament s’accompagne parfois d’effets secondaires graves tels que des œdèmes et des hémorragies cérébrales, qui peuvent être fatales dans des cas exceptionnels. La non-approbation de ce médicament est un énième coup dur pour la recherche menée sur la maladie d’Alzheimer et d’autres formes de démence. Il est toutefois curieux qu’on ne s’intéresse qu’à ce médicament dont le seul effet est le ralentissement du déclin cognitif. 

Parallèlement, de plus en plus de recherches montrent que la démence est une affection complexe causée par toute une série de facteurs de risque potentiels qui se manifestent souvent des décennies plus tôt :  un taux de glycémie trop élevé, une inflammation chronique, des problèmes de vascularisation dans le cerveau…. - pour ne citer que les plus importants. Ce sont les principales causes de la démence et, malheureusement, il ne suffit pas d'une seule pilule pour les faire disparaître. La démence requiert une approche multidisciplinaire, qui s’attaque aux facteurs risques sous-jacents, ceux qui sont susceptibles de déclencher cette maladie. »

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L’approche multidisciplinaire pour traiter la démence

Pour le Pr ém. Réginald Deschepper, « la prévention précoce constitue le meilleur moyen d’éviter la démence. Il s’agit d’une forme personnalisée de médecine de précision, qui détecte et soigne les facteurs de risques individuels. Au moins trois interventions basées sur cette approche multidisciplinaire sont parvenues à freiner et même à inverser une démence ou même une maladie d’Alzheimer chez des personnes atteintes à un stade précoce. Cela signifie que dans beaucoup de cas, des personnes souffrant d’un début d’Alzheimer se portent mieux au bout de quelques mois : elles récupèrent leurs capacités cognitives et les biomarqueurs typiques, mesurés dans le sang ou par scanner, indiquent également une amélioration. »

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Une étude de l’équipe de Dean Ornish menée auprès de personnes souffrant de TNC (troubles neurocognitifs légers) ou d’un début de démence vient de paraître. L’intervention comprenait l’adaptation du régime alimentaire (peu transformé et à base de plantes), la gestion du stress (méditation, yoga), l’exercice (marche et musculation modérée) et le soutien social (groupe de discussion), ainsi que certains compléments alimentaires. Après 20 semaines, le groupe qui suivait le programme a effectué des progrès significatifs. Ces améliorations ont été confirmées par différents biomarqueurs. Le groupe de contrôle, qui n’a reçu que les soins classiques, a continué à régresser.

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L’adaptation du style de vie est le meilleur médicament

Le Pr ém. Reginald Deschepper confirme ces résultats : « je comprends qu’on fasse preuve de scepticisme face à ce type d’études. S’attaquer à une maladie tenace avec d’aussi simples moyens peut paraître trop beau pour être vrai. Pourtant, les données dont nous disposons indiquent un effet qu’aucun médicament n’a jamais obtenu. D’ailleurs, d’autres groupes de chercheurs (les études FINGER, RECODE et SMARRT) présentent des résultats comparables. Nous savons pourquoi la méthode fonctionne mais il est essentiel de s’attaquer simultanément à tous les domaines en même temps.

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Bien évidemment, d’autres études doivent confirmer ces résultats et ce n’est pas si évident car elles ne rapportent pas d’argent. Ce type de recherche ne débouche pas sur un médicament que la moitié du monde attend. Mais d’autre part, quels sont les risques de cette approche ? Nous savons qu’elle s’accompagne d’une série « d’effets secondaires » mais ils sont tous bénéfiques : moins d’affections cardiovasculaires, moins de déclin fonctionnel, ce qui signifie que le patient conserve plus longtemps son indépendance, moins d’autres maladies chroniques, une meilleure qualité de vie et moins de frais, pour le patient et la société.

En résumé, il est temps que les gens cessent d’écouter le triste message selon lequel on ne peut rien faire contre la démence. Vous pouvez entreprendre beaucoup de choses mais n’attendez pas qu’il soit trop tard. »

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Le Pr ém. Reginald Deschepper est un des inspirateurs de LifeMe, une association qui veut investir dans un style de vie sain, d’une manière scientifiquement fondée, pour prévenir les maladies chroniques, les traiter et, si possible, les guérir. Son livre « Bescherm je brein tegen dementie » (protégez votre cerveau de la démence) est paru le 20 août 2024.

auteur : Sofie Van Rossom - journaliste santé

Dernière mise à jour: septembre 2024

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