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Cancer : faut-il tout dire au patient ?
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Comment annoncer à un patient qu’il souffre d’un cancer ? L’approche peut s’avérer très délicate, mais la vérité est nécessaire. La question étant de savoir ce que l’on entend par « vérité ».
« Les vérités que l’on tait deviennent venimeuses. » Cette citation de Nietzche ouvre un chapitre important d’une brochure extrêmement intéressante, publiée par la Fondation contre le Cancer (*), et intitulée : « Cancer : tant de choses à se dire ». Sous-titre, qui résume parfaitement l’objectif de cet ouvrage : « De la prévention à la fin de vie : améliorer la communication entre soignants, patients et entourage ».
L’une des questions abordées – parmi beaucoup d’autres - concerne la teneur et la qualité du dialogue entre le médecin et le patient, lorsque le diagnostic de cancer vient d’être posé, et tout au long du suivi. Tout dire, dire en partie, dire quand, dire comment… ? Cela ne va pas de soi.
Pourquoi dire la vérité ?
La question centrale, forcément.
Ainsi que le rappelle Pascale Gruber, auteur de ce livret, « longtemps, les médecins ont hésité ou même refusé d’annoncer à leurs patients qu’ils étaient atteints d’un cancer ». Les choses ont changé, et la plupart des praticiens considèrent que le mensonge par omission – pour « protéger » le patient, pour ne pas le « démoraliser » – engendre des effets plus nuisibles que bénéfiques.
Il convient de noter qu’aujourd’hui, avec le renforcement sensible de l’efficacité des traitements, le mot « cancer » n’est plus systématiquement traduit par « issue fatale », comme c’était souvent le cas par le passé. « La recherche d’une alliance thérapeutique repose sur une confiance où le mensonge n’a plus sa place », poursuit Pascale Gruber. « Les explications du médecin ont pour but de permettre le consentement éclairé du malade. On sait qu’une parole « honnête » améliore l’observance du traitement. »
En fait, « ne pas savoir » plonge en quelque sorte dans l’inconnu, et ne permet pas de se battre en connaissance de cause contre l’ennemi.
On dit tout ou juste une partie ?
« La vérité n’est ni neutre, ni monolithique » : cette observation est très pertinente, singulièrement dans une situation aussi chargée d’émotions que l’annonce d’un diagnostic de cancer.
Le Pr Marc Peeters, oncologue belge de grande notoriété, explique : « Pour des raisons liées à leur histoire ou à leur culture, certains de nos malades refusent d’être informés, et il faut respecter ce choix ». Et dès lors, poursuit Pascale Gruber, « la vérité n’est pas toujours divulguée, ou pas dans son entièreté, ou pas immédiatement ».
Dans un livre intitulé « Les vérités du cancer », Sylvie Fainzaing explique qu’entre les médecins qui ne disent presque rien, sinon le « minimum légal », et ceux qui disent tout, certains pour prévenir tout reproche ultérieur, le plus grand nombre ne dit qu’une partie. A cet égard, annoncer à un patient que son cancer est incurable anéantit de facto toute perspective d’acceptation pleine et entière d’un recours thérapeutique. Le risque est d’ailleurs réel, ajouterons-nous, que le patient se tourne par désespoir vers des solutions hasardeuses, se mette entre les mains de « thérapeutes charlatans ».
La tentation du silence
Point d’ancrage : « Parler du cancer est moins tabou. Mais cela ne signifie pas qu’une information franche et complète va circuler tout au long de la maladie, en particulier lorsque les mauvaises nouvelles surviennent après l’annonce du diagnostic. » Exemple-type : le terme « métastase », très rarement prononcé par un médecin face au malade.
Choisir avec soin les mots pour le dire, et la manière de les exprimer : la tâche n’est pas facile. Mais fondamentalement, indique le Pr Marc Peeters, « quand la situation n’évolue pas comme nous l’aurions voulu, il faut continuer à informer le patient, expliquer, dans certains cas, que l’on doit changer de stratégie, et que cela peut avoir un impact sur le pronostic ».
Et le praticien doit éviter de tomber dans le piège « classique » du « paternalisme », avec infantilisation de son interlocuteur. Le Dr Didier Vander Steichel, directeur médical et scientifique de la Fondation contre le Cancer, insiste sur le fait que quand les nouvelles sont défavorables, « le malade doit ou devrait en tout cas recevoir une assurance : que tout sera mis en œuvre et qu’il ne sera pas abandonné ». Pour cela, le dialogue est évidemment fondamental.
« Parler fait partie du traitement », prévient ainsi un oncologue. Un autre ajoute : « Quand la décision n’est pas évidente, parfois, personne ne veut l’assumer, ni même l’évoquer. Les choses sont laissées en bout de liste et, comme par hasard, le jour suivant, elles se retrouvent encore en bout de liste ».
Le langage du médecin
Citant le Pr Darius Razavi (ULB), Pascale Gruber rappelle qu’au départ « la communication soignants - soignés a pour fonction essentielle de répondre à un besoin d’information. Puis, elle devient une fin en soi. Le dialogue médecin - patient permet d’identifier les besoins du patient et d’adopter une approche individualisée ». Et de mettre en exergue cette phrase du psychologue Serge Marchal : « Pour articuler la douleur ou la souffrance, on n’a encore rien inventé de mieux que la parole, qui aide à donner un sens à ce qui est insensé : la maladie ».
La parole, mais aussi la gestuelle, l’expression corporelle, l’intonation, le sourire, le toucher… : autant d’éléments de communication extrêmement importants. « Un vocabulaire commun s’impose », qui exclut le jargon médical et se méfie de mots entrés dans le langage courant, mais dont le sens n’est pas partagé de la manière par tous (chimio, rayons, stade du cancer, etc.).
Le langage du patient
Souvent, le patient ne dit pas ce qu’il attend du médecin, alors que ce dernier estime savoir ce que le patient attend de lui. La personne malade doit s’exprimer, et le praticien doit l’y encourager.
Cette démarche commune est importante sur un plan émotionnel, affectif, relationnel ; mais elle permet aussi d’adapter le traitement avec davantage de finesse, en tenant compte des aspirations du patient. Et que malades et médecins sachent, une bonne fois pour toute, qu’une question « bête », cela n’existe pas ! Toute interrogation doit recevoir une réponse. Ne jamais cacher ses doutes, ses peurs, ses angoisses.
Conseil : ne pas hésiter, avant de se rendre au cabinet du médecin, à noter ses questions sur papier. D’abord, cela permet de ne pas en oublier, et ensuite, au moment de la rédaction, de mettre des mots sur ses maux, tant physiques que psychologiques.
Le livret « Cancer : tant de choses à se dire » aborde la communication sous de multiples aspects. De nombreux témoignages de patients accompagnent l’avis d’un éventail de spécialistes. Une lecture particulièrement utile.
(*) www.cancer.be – info@cancer.be – 02/736.99.99.