Polyarthrite rhumatoïde : le traitement de base

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Le traitement de la polyarthrite rhumatoïde doit être entamé aussi vite que possible après le diagnostic, de préférence dans les 2 à 3 mois, afin de freiner l’évolution de la maladie. C’est la seule manière de garantir une qualité de vie satisfaisante au patient. 

Voir aussi l'article : La polyarthrite rhumatoïde : un rhumatisme inflammatoire

Qu'est-ce que la polyarthrite rhumatoïde ?

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La polyarthrite rhumatoïde (PR) est une maladie immunitaire chronique qui s’accompagne de problèmes articulaires (douleur, gonflements, raideurs, limitation des mouvements) et parfois de symptômes généraux (fatigue, fièvre, suées, perte de poids) ainsi que d’atteintes systémiques (nodules, vasculites, atteinte pulmonaire…).

Environ 1% de la population souffre de polyarthrite rhumatoïde. En Belgique, on estime le nombre de patients à 80.000, voire 100.000. Les femmes sont trois fois plus touchées que les hommes. La maladie peut se déclencher à tous les âges mais elle frappe plus souvent les personnes de 40 à 50 ans, à peu près au début de la ménopause.

On en ignore la cause exacte mais le système immunitaire probablement déréglé se retourne contre les propres tissus de l'organisme, provoquant des inflammations dans diverses articulations. Les mains et les pieds sont souvent touchés. La capsule s’enflamme et gonfle progressivement, gagnant d’autres parties de l’articulation. Si l’affection se prolonge, elle peut affaiblir les os de l’articulation.

Les conséquences de l’AR sur le quotidien peuvent être considérables si la maladie n’est pas traitée à temps ou n’est pas sous contrôle. Dans le pire des cas, l’AR peut entraîneur des malformations, même si c’est rare. Fatigue et douleurs sont les plaintes les plus fréquentes et ont un impact sur les activités quotidiennes. L’AR accroît aussi le risque de maladies cardiovasculaires.

Le déroulement de la maladie est imprévisible et varie de patient à patient. Certaines personnes ont de légères crises qui ne laissent aucune séquelle, d’autres les subissent durant quelques périodes, sans conséquence néfaste. Par contre, si l’arthrite est agressive et régulière ou continue, les séquelles peuvent être très graves.

L’approche de la polyarthrite rhumatoïde a beaucoup évolué en quelques années. La rapidité du diagnostic et des traitements adaptés permettent d’endiguer les suites de la maladie et de préserver la qualité de vie des patients. Il est important de respecter la médication.

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But du traitement

Aucun traitement ne permet de guérir, à l’heure actuelle, la maladie, mais on peut stopper les phénomènes inflammatoires et ainsi prévenir la détérioration des cartilages et des articulations (rémission). L’objectif est de réduire au maximum l’activité de l’arthrite dans les trois à six mois.

Un diagnostic rapide permet d’entamer très tôt le traitement, ce qui est très important, à court comme à long terme. Un traitement agressif et rapide pendant les deux premières années de l’affection peut considérablement améliorer la qualité de vie. Il faut donc envoyer tout patient susceptible de souffrir de polyarthrite rhumatoïde chez un rhumatologue et, si le diagnostic est confirmé, entamer le traitement sans plus attendre. Par la suite, celui-ci doit faire l’objet d’une évaluation régulière, tous les deux mois, et être adapté afin d’atteindre l’objectif poursuivi dans les 3 à 6 mois.

Approche multidisciplinaire


L’arthrite rhumatoïde nécessite une approche multidisciplinaire. En plus des médicaments, on prend des mesures telles que kinésithérapie, ergothérapie, soutien psychologique etc.

Traitement médicamenteux


Pour le volet médicamenteux, il faut opérer un distinguo entre :

  • le traitement symptomatique (combattre les plaintes) par
    - anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS)
    - glucocorticoïdes, ou cortisone dit plus simplement (prednisolone)

Les anti-inflammatoires AINS peuvent soulager la douleur et la raideur articulaires mais n’ont pas d’effet sur l’évolution de la maladie. Les corticostéroïdes sont de puissants anti-inflammatoires.

  • Le traitement de base, avec des disease-modifying antirheumatic drugs (DMARD), c'est à dire des médicaments qui freinent le rhumatisme. Ils ont un impact sur le mécanisme de la maladie.
Le traitement de base doit débuter le plus vite possible, de préférence dans les 2 à 3 mois, pour ralentir ou arrêter l’évolution de la maladie. C’est la seule façon de garantir une qualité de vie suffisante au patient. La PR progresse particulièrement vite dans sa phase initiale.

Voir aussi l'article : Polyarthrite rhumatoïde : l'efficacité de la thérapie combinée « light » à la cortisone

Médicaments pour le traitement de base de la polyarthrite rhumatoïde

On dispose de plusieurs médicaments pour le traitement de base de la polyarthrite rhumatoïde.

1. Les DMARD classiques

On pense au méthotrexate, à la leflunomide, à la sulfasalazine et aux médicaments contre la malaria, la chloroquine et l’hydroxychloroquine (on ne trouve plus de préparations à base de sels d’or en Belgique).

  • Le méthotrexate agit sur les symptômes cliniques et sur les signes radiologiques de la polyarthrite rhumatoïde et reste le premier choix.
Le MTX existe sous forme de comprimés. Si vous les supportez mal ou s’ils ne sont pas assez efficaces, votre médecin peut vous prescrire des injections (sous-cutanées ou intramusculaires).

Habituellement, on utilise les comprimés de 2,5mg. On les trouve aussi à un dosage supérieur (10 mg) mais on l’évite souvent pour éviter toute confusion car ils ont quasiment la même couleur et la même forme. Le médecin vous explique combien de comprimés vous devez ingérer par semaine. Il est important de prendre la dose hebdomadaire le même jour de la semaine, en une fois ou en plusieurs prises réparties sur la journée (par exemple deux fois trois comprimés ou trois fois deux).
Les injections sont également hebdomadaires, toujours le même jour. Votre médecin ou votre infirmier vous expliquera comment procéder. Vous pouvez vous injecter vous-même le produit ou en charger une autre personne.

Les principaux effets secondaires du méthotrexate, aux doses utilisées pour combattre la PR sont une atteinte du foie et des problèmes gastro-entérique (nausées, diarrhée…) ainsi que des problèmes d’ordre sanguin (anémie, carence en certains globules). L’administration d’acide folique (1 mg par jour ou 5 mg par semaine) peut atténuer certains de ces effets secondaires.

On ne peut pas utiliser le méthotrexate pendant la grossesse ni durant les 3 à 6 mois précédant la conception.

  • Leflunomide et sulfasalazine peuvent constituer une alternative, en début de traitement, quand on ne peut pas prescrire de méthotrexate ou qu’il entraîne trop d’effets secondaires, mais leur efficacité et leur sécurité sont moins étayées.
On ne peut pas prendre de leflunomide pendant la grossesse ni 1 à 2 ans avant la conception. Le médecin peut appliquer une procédure de "wash-out" ou lavage pour évacuer plus vite le médicament du corps en cas de désir actuel de grossesse.

La sulfasalazine peut être administrée en toute sécurité pendant la grossesse et l’allaitement. Discutez avec votre médecin de la nécessité de prendre des suppléments, comme l’acide folique.

Sulfasalazine kan wel veilig gebruikt worden tijdens de zwangerschap en borstvoeding. Bespreek met de arts of eventuele supplementen nodig zijn, zoals foliumzuur.

  • La chloroquine et l’hydroxychloroquine semblent moins efficaces mais sont parfois employées, par exemple dans les formes plus légères ou en combinaison avec d’autres médicaments.

2. Les glucocorticoïdes

Bien qu’ils ne soient pas considérés comme des DMARD, ils ont un effet bénéfique sur l’évolution de la maladie.

Combinée à un DMARD ou à une association de DMARD, les glucocorticoïdes (prednisolone) atténuent les symptômes et la détérioration des articulations. Dans la mesure où ils freinent rapidement l’évolution de la maladie, ils peuvent être utiles au début du traitement de base, parfois à de fortes doses progressivement réduites.

Compte tenu des risques liés à un traitement de longue durée, il vaut mieux diminuer progressivement la dose jusqu’à interruption dès que les symptômes disparaissent, à moins qu’on administre une dose très faible.

Différentes études, parmi lesquelles la CareRAstudie de la KULeuven, démontrent qu’une combinaison d’un ou plusieurs DMARD et de glucocorticoïdes constitue le meilleur traitement de départ. Environ 70% des patients parviennent ainsi à contrôler la maladie. En cas d’échec, on peut passer à d’autres médications.

Voir aussi l'article : Rhumatisme de l’enfant : arthrite juvénile idiopathique (AJI)

3. Les médicaments biologiques

Il s’agit des inhibiteurs du TNF : adalimumab, certolizumab, etanercept, golimumab, infliximab, abatacept, rituximab, sarilumab et tocilizumab.

Les biomédicaments, comme on les appelle, ne sont administrés que si la première approche, avec les DMARD et les glucocorticoïdes, ne donne pas de résultat. Ils peuvent être prescrits séparément ou en combinaison avec le méthotrexate. L’INAMI ne rembourse les médicaments biologiques dans le cadre d’une PR que lorsqu'un traitement classique associant au moins deux DMARD, parmi lesquels le méthotrexate, a échoué. Il s’agit de médicaments très chers, qu’on ne peut donc pas prescrire à tout le monde. 

Les principaux effets indésirables des biomédicaments ? Des réactions allergiques locales ou généralisées et une plus grande vulnérabilité aux infections virales et bactériennes. On n’exclut pas un risque accru de lymphome mais il n’a pas été clairement démontré.

Certains biomédicaments peuvent constituer une alternative pour les femmes enceintes ou celles qui désirent un enfant.

Une fois que leur brevet est arrivé à terme, les médicaments biologiques peuvent être remplacés par des génériques, les biosimilaires. Ils contiennent le même composé biologique initial. Ils ne sont pas identiques mais leur efficacité est démontrée, de même que leur sécurité. 

4. Les inhibiteurs de JAK

Ce sont les petits derniers du marché. Ils inhibent l’activité des enzymes de Janus Kinaze, une famille de quatre enzymes ayant un rôle dans les processus inflammatoires. Ils inhibent les signaux des enzymes et freinent ainsi la formation d’inflammations. Raideurs et œdèmes diminuent.

Actuellement, on peut se procurer les inhibiteurs de JAK suivants : baricitinib, filgotinib, tofacitinib et upadacitinib. Ils ont l’avantage d’être disponibles sous formes de comprimés. Il n’est donc pas nécessaire de procéder à des injections ni à des perfusions.

Ces médicaments étant également très chers, on ne les administre qu’en cas d’échec du traitement classique.

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Quel traitement choisir ?

Tous les patients ne répondent pas bien à chaque thérapie. Il est impossible de prévoir la réaction du patient à un traitement. L’expérience du médecin et sa connaissance des différentes possibilités de traitement sont essentielles. 

Les patients au pronostic favorable réagissent souvent bien à une monothérapie au méthotrexate alors que ceux qui souffrent d’une forme plus grave ou plus agressive profitent davantage d’un traitement comprenant aussi des glucocorticoïdes.

D’autre part, des études récentes révèlent que la combinaison du méthotrexate avec un autre DMARD (un classique ou un médicament biologique) augmente l’efficacité du traitement.

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Recommandations de la Ligue européenne contre le rhumatisme (Eular)

  • Le traitement doit débuter le plus vite possible après le diagnostic.
  • Premier choix : un DMARD classique (habituellement le méthotrexate), éventuellement avec un glucocorticoïde. Il faudra progressivement diminuer la dose de ce dernier.
  • Si le méthotrexate n’est pas efficace, après six mois, il faut lui adjoindre un autre DMARD classique.
  • On peut y ajouter un médicament biologique, en général un inhibiteur du TNF, si les DMARD classiques n’ont pas suffisamment d’effets ou si des facteurs font craindre un pronostic défavorable (par exemple un taux élevé d’anticorps, comme le facteur rhumatoïde ou les anticorps anti-CCP, un taux d’activité élevé de la maladie, des paramètres inflammatoires élevés, apparition subite d'érosion articulaire).

Arrêt du traitement

Quand le traitement réussit, que le patient est en rémission, sans douleurs ni symptômes inflammatoires, on se demande souvent si on peut alléger ou arrêter le traitement de base. Un arrêt peut cependant déclencher une nouvelle crise inflammatoire. On ne peut envisager de diminution très progressive du dosage qu’en cas de rémission de longue durée (plus de 6 mois).

N’interrompez jamais le traitement de votre propre chef. Si vous avez la moindre question, la moindre inquiétude quant au traitement et/ou ses effets secondaires, n’hésitez pas à en parler à votre médecin.

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Traitement pendant la grossesse

La maladie doit être sous contrôle avant d’envisager une grossesse. Les patientes atteintes d’une PR active auront globalement du mal à tomber enceinte.

Il faut absolument arrêter de prendre certains médicaments, le risque de malformation du fœtus étant trop important. Il s’agit du méthotrexate (trois mois d’arrêt) et de la leflunomide (12 mois d’interruption ou une procédure d’élimination). Le patient masculin dont la partenaire veut un enfant doit également interrompre son traitement.

Il faut donc aborder ce sujet à temps, si possible dès que le diagnostic est posé, avec le rhumatologue. D’autres médicaments peuvent être administrés en toute sécurité pendant la grossesse : la sulfasalazine, l’hydroxychloroquine et les corticostéroïdes. Les médicaments biologiques sont généralement prescrits jusqu’à la grossesse puis interrompus, même si, entretemps, on a découvert que certains, comme le certolizumab, pouvaient être pris en toute sécurité.

Les femmes enceintes jouissent souvent d’une rémission spontanée pendant la grossesse, en particulier au troisième trimestre, surtout si leur sang ne présente pas d’anticorps RF et CCP. Par contre, après l’accouchement, le risque de crise augmente.
Certains médicaments ne peuvent pas être pris pendant l’allaitement (Ledertrexate, Arava, Salazopyrine). Le plaquenil est autorisé mais pas plus de 6 semaines.

Voir aussi l'article : Maladies chroniques : Heidi souffre de polyarthrite rhumatoïde, de Tietze, Bechterew et Crohn

Sources :
www.raliga.be
www.reumanet.be
www.bcfi.be



Dernière mise à jour: octobre 2022

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